Lettre de Jean Lassalle à Alain Rousset

Paris, le 18 octobre 2008

A l’attention d’Alain ROUSSET, Président du Conseil Régional d’Aquitaine

Lettre chronique

Monsieur le Président,

Je me dois de vous faire part, une fois de plus, de mon étonnement devant l’attitude qui est la vôtre à l’égard de l’ensemble des dossiers du haut-béarn et plus particulièrement des vallées béarnaises dont l’Institution Patrimoniale du Haut Béarn (IPHB) que je préside.

Pourtant, vous n’avez pas dans votre région beaucoup de territoires qui, déjà forts d’une si légendaire et historique identité ont eu à connaître semblables brulures au cours de ces dernières années. Véritable laboratoire d’idées, ils ont eu à faire face à des dossiers d’ampleur nationale et internationale suscitant tour à tour consensus forts et profondes déchirures.

-Construction puis arrêt du Pau-Canfranc,

-Construction du tunnel du Somport, puis arrêt des travaux sur la RN134,

-Liaison autoroutière Pau-Oloron, entièrement financée et prête au démarrage des travaux,en 1994, complètement abandonnée en 2008.

-Interminables débats à propos de l’aménagement de stations de sports d’hiver,

-Douloureux et incessants débats depuis cinquante ans à propos de la présence de l’ours brun des Pyrénées et de sa cohabitation avec les populations dites « locales »,

-Création puis extension du Parc National des Pyrénées,

-Sauvetage puis affirmation d’une volonté farouche de conserver bien vivante dans ces vallées une industrie qui fut la première à se faire jour dans notre département après les forges de l’Adour.

En toutes occasions, vous vous déclarez très intimement lié aux vallées béarnaises. Toutefois, vous avez à ce jour systématiquement manqué, au cours de vos années de présidence, tous les rendez-vous qu’elles ont eu avec l’histoire alors qu’elles comptaient sur vous.

Lorsque par bonheur, vous ne faisiez pas le mauvais choix, vous vous êtes systématiquement opposé à elles.

L’histoire de l’IPHB dont je veux plus particulièrement vous parler ici en est l’une des illustrations les plus marquantes.

A l’époque, au début des années 90, le plantigrade n’était plus présent que sur les seules vallées béarnaises. Il avait disparu partout ailleurs. Las de voir ce sujet faire la une des journaux télévisés de cette époque suite aux très hasardeuses initiatives qu’il eut prises, après avoir enregistré la mise en garde à vue de plus de cent cinquante personnes, sous son égide, l’État et l’ensemble des pouvoirs publics, parmi lesquels la région Aquitaine, décidèrent de se doter d’une structure entièrement consacrée à la gestion de ce sujet. Hors normes, hors solutions,hors précédents et exemples de gestion réussie en pays démocratique: la tentative de sauvetage de l’ours des Pyrénées avec recherche d’une cohabitation avec les populations dites « locales » et la définition d’une politique de développement durable pour ces territoires d’exception lui furent assignées.

Une structure comparable, vit le jour, à peu près à la même époque, en Pays Basque, elle s’appelait Pays Basque 2010. Elle avait pour objet de tenter de maintenir le Pays Basque dans le giron du département des Pyrénées Atlantiques .Cette dernière, connut un apaisement des tensions que j’espère durable.

S’agissant de la malheureuse Institution Patrimoniale du Haut Béarn ,il en alla différemment. Après une première période très réussie, l’importation d’ours extérieurs aux quatre coins des Pyrénées enflamma de nouveau le conflit sans que les vallées béarnaises y fussent pour quoi que se soit. Non content d’avoir catégoriquement refusé en son temps son inscription sur le Contrat de Projet signé avec l’État au même titre que Pays Basque 2020, vous vous acharnez désormais à tenter par tous les moyens de discréditer et de détruire cette structure, à la création de laquelle la Région Aquitaine a pourtant si fortement contribué.

Profitant de la très douloureuse situation qu’a eu à connaître notre organisation après la mort de l’ourse Cannelle et plus particulièrement dans sa relation avec l’État, vous avez tout fait, durant les deux dernières années, pour l’étouffer financièrement. Vous n’avez voté les maigres subsides que vous continuez à lui accorder qu’en toute dernière minute et lorsqu’il vous est devenu manifestement impossible de faire autrement.

Je sais l’importance naturelle que vous portez habituellement à l’application des Contrats et Chartes et j’ai, de ce fait, de plus en plus de mal à comprendre la nature de votre relation à la nôtre.

Cette année encore, alors que vous n’aviez même plus l’excuse de ses difficiles relations avec l’État, puisque ce dernier s’est à nouveau fortement investi financièrement dans son budget, vous ne vous êtes toujours pas acquitté d’une partie de votre participation que vous réduisez considérablement en vertu d’un mode de calcul que vous êtes le seul, je crois, à avoir compris. Vous avez même trouvé moyen de recueillir l’avis du comité économique et social d’Aquitaine avec lequel nous n’avons pourtant jamais eu le moindre échange sur la question.

Depuis le printemps dernier, vous vous acharnez à établir le fait que notre malheureuse Institution aurait extorqué 6300 € à l’association de Pêche de la Vallée d’Aspe « La Gaule Aspoise » présidée par un ami de toujours mais avec lequel un malentendu, s’est malheureusement fait jour.

On pourrait imaginer le Président du Conseil Régional d’Aquitaine occupé, en des temps si douloureux pour nos concitoyens, à de plus importantes tâches.

On pourrait l’imaginer par exemple aux États-Unis en train d’essayer de convaincre les actionnaires de Ford de cesser le démantèlement de la mythique usine de Blanquefort qui se situe à quelques pas de chez vous.

On pourrait vous imaginer plus près de nous en train de vous battre à nos côtés pour la liaison routière Pau-Oloron, la substituant ainsi à la tragique RN 134 et à l’amélioration de cette dernière dans la traversée de la vallée d’Aspe.

Vous proclamez urbi et orbi votre décision de rouvrir, juste après les prochaines élections, le Pau Canfranc, alors que son tracé actuel dont je n’ai pas entendu dire qu’il fût changé, passe désormais en plein dans l’usine Messier de Bidos, à proximité de quelques unes des machines les plus modernes et les plus chères du monde. On pourrait donc vous imaginer expliquant enfin clairement comment vous envisagez sa relation avec l’indispensable amélioration routière en chantier, mais en panne depuis le début de votre mandat. Je partage très profondément votre attitude volontariste à propos de la réouverture de la ligne Pau-Canfranc. Mais je crains que l’histoire ne retienne que vous vous êtes plus servi d’elle que vous ne l’avez effectivement servie.

A ce propos, personne ne comprend absolument rien à votre position sur cette équation qui j’en conviens est bien délicate si elle n’est pas menée de manière compréhensive et méthodique. A ce propos, Je m’étonne de ne pas vous avoir aperçu une seule fois à l’Assemblée Nationale durant le débat traitant du Grenelle de l’environnement, qui a pourtant duré près de quinze jours, alors que tous les partis en présence, et en particulier le votre, se sont efforcés de rechercher des solutions à ces redoutables problèmes. L’absence du président du conseil Régional d’Aquitaine y a été d’autant plus dommageable, que de très nombreux dossiers concernant notre région et la conurbation bordelaise font partie de ceux qui suscitent le plus de questions.

On pourrait vous imaginer aussi plus critique à l’égard du Parc National des Pyrénées qui n’envisage rien de moins que de s’étendre sur l’ensemble des territoires des vallées d’Aspe et d’Ossau, passant de 45.000 à 206.000 hectares.

Or il n’en n’est rien ; vous restez d’un silence assourdissant sur le sujet, et par-dessus le marché votre délégué officiel auprès du Parc est le seul des représentants de notre département à voter pour ! Comprenne qui pourra…

On pourrait enfin vous imaginer au coté des haut-béarnais, défendant bec et ongle, au titre de l’aménagement du territoire et de l’égalité des chances pour tous, la maternité d’OLORON SAINTE MARIE dont la fermeture obligera les femmes de nos vallées béarnaises et souletines à plus de deux heures de route pour aller accoucher à PAU, en empruntant la route que vous savez.

Mais non, vous n’êtes décidément pas là. Par contre cette fois ci, votre délégué, bien plus inspiré que le premier, notre ami René Ricarrère fait tout ce qu’il peut dans le bon sens.

Pourtant vous m’avez dit et répété cet été, que vous ne ménageriez pas votre peine pour aider le piémont oloronais sur ce dossier vital. Mais c’est toujours pareil avec vous; débordant de gentillesse lorsqu’on vous rencontre, empathique, résolu en diable, mais malheureusement aux abonnés absents dès que l’on a besoin de vous.

Monsieur le Président, pourriez-vous tenter d’expliquer, ne serait-ce qu’une fois, la nature de votre problème à notre petite région et à notre égard? Nous ne nous sommes pas séparés une seule fois sans que vous ne m’ayez proposé une rencontre à BORDEAUX ou à PARIS, qui bien entendu n’a jamais eu lieu, pas plus que votre promesse de permettre à l’IPHB de présenter son bilan de près de quinze ans d’activité aux élus du Conseil Régional d’Aquitaine. Cette démarche d’une si grande simplicité, pourrait pourtant s’avérer fort utile pour lever les incompréhensions mutuelles qui se sont installées sur ce sujet. Les conseillers régionaux ont le droit de savoir où est passé l’argent du Conseil Régional.

21 communes des vallées d’Ossau, d’Aspe et de Barétous représentant plus de 100 000 hectares, travaillent ensemble dans l’Institution Patrimoniale du Haut-Béarn depuis maintenant 13 ans. Elles s’efforcent d’assumer tant bien que mal une présence humaine dans ces vallées avec la présence du fauve en totale liberté. Je vous rappelle que cette situation n’a encore jamais pu être gérée à ce jour en pays démocratique.

Au fait, quel est votre position sur le sujet? Et celle du Conseil Régional d’Aquitaine? Faut-il garder les ours? Faut-il les laisser disparaître? Faut-il continuer à tenter de gérer la cohabitation? Faut-il abandonner une fois pour toutes plus de 200,000 hectares de ce territoire aux griffes du Parc National (cette attitude ne manquerait du reste pas de sel, venant d’un régionaliste aussi convaincu que vous, même si elle aurait le mérite de vous « débarrasser du bébé avec l’eau du bain »).

Oui vraiment je vous l’assure, votre position et celle du Conseil Régional d’Aquitaine sur ces sujets nous intéresseraient vivement. Sans compter qu’en vertu de vos compétences, elles devraient être connues depuis longtemps.

Je me suis permis de rendre l’ensemble des Conseillers Régionaux d’Aquitaine et des membres de l’IPHB destinataires du présent envoi, dans l’espoir que leur réflexion et leur bon sens associés puissent nous permettre de sortir par le haut de ce mauvais pas.

Pour ma part, je reste résolument confiant dans notre capacité à nous entendre au nom de l’intérêt supérieur que nous représentons tous les deux, dans nos rôles respectifs.

Dans l’attente de la suite que vous voudriez bien donner à ma missive, je vous assure Monsieur le Président, de mes sentiments les meilleurs.

Jean LASSALLE

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